De la gratitude à la haine : possible effet paradoxal de la générosité

Perchée au sommet des vertus salvatrices,
Soutenue par le grand cœur qui la structure,
Magnifiée par les Saintes Écritures,
Vantée par toutes les spiritualités
Et servant de pilier à l’humanité,
La générosité, reflet du sens du don,
S’oppose à la pécheresse avarice,
Dont elle est l’antagoniste cotylédon.

 

Elle ne vise que l’intérêt de l’indigent,
Dont l’espoir est nourri d’un acte diligent,
Dont priment le bien-être et le besoin,
Dont aucune contrepartie n’est attendue,
Ni à l’instant, ni demain, ni après-demain,
Libéré qu’il est de la hantise d’un dû.

 

L’acte salvateur né de la générosité,
Auréolé d’un initial grand merci,
Est marqué d’une profonde gratitude,
Dont ne fait aucun doute la sincérité
De l’être objet de la sollicitude,
Et dont l’horizon subit une éclaircie.

 

Fait paradoxal propre à l’esprit humain,
L’acte généreux répétitif ou constant
Est par sa cible perçu comme un butin,
Mué en devoir de l’être bienfaisant,
Aux ressources imaginées illimitées,
Qu’il doit mobiliser avec agilité.

 

Ascendante est la courbe des attentes,
Descendante est celle des satisfactions,
De plus en plus béante est la scission,
Qui succède à l’initiale entente,
Que la vertu était censée pérenniser,
Entre le nanti et l’être fragilisé.

 

Le paradoxe est d’autant plus saisissant,
Qu’il se nourrit fortement des liens de sang,
Qu’il s’observe dans toutes les sociétés,
Qu’il remonte à la haute Antiquité,
Qu’il s’ancre dans la psychologie humaine,
Et qu’il sert d’humus à la féroce haine.

 

Doit donc être philosophe le possédant,
Généreux, car non possédé par ses biens,
Libre d’esprit, car se voulant indépendant,
Épris de vertus, mais non moralisateur,
Fort, car de ses émotions, dominateur,
Et lucide, car ne s’étonnant plus de rien.

0 réponses

Laisser un commentaire

Rejoindre la discussion?
N’hésitez pas à contribuer !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *